Comment répondre à un appel d’offre intégrant des matériaux de réemploi ?

Bonnes pratiques Rédigé par : Clémence Drouglazet 20 avril 2023

Lors d’un appel d’offre intégrant une démarche de réemploi, il n’est pas toujours simple de faire une réponse fiable et précise : disponibilité des matériaux inconnue, gisements non homogènes ou chiffrage difficile à estimer. Découvrez dans cet article nos méthodes pour répondre efficacement à un appel d’offre en intégrant des matériaux de réemploi.

Lever les freins à l’engagement

Dans le cadre d’un approvisionnement extérieur en matériaux de réemploi, la première difficulté réside dans l’engagement sur les quantités. En effet, les matériaux de réemploi sont des gisements temporaires et leur disponibilité est principalement éphémère : actuellement, le modèle d’approvisionnement fonctionne à 80% en flux tendu entre un chantier de déconstruction et un chantier de construction. À l’inverse, 15% des flux disponibles à date de recherche peuvent être tempérés par du stockage en entrepôt, et 5% sont issus de filières de reconditionnement qui assurent une disponibilité à plus long terme.

Entre la phase de réponse à un appel d’offre, la passation du marché et la phase d’exécution, de nombreux mois peuvent s’écouler : comment alors s’engager à une date D1 sur une quantité à fournir à une date D2, sans être sûr de la disponibilité de l’élément ?

Cibler les matériaux propices au réemploi

Dans un premier temps, il est nécessaire de cibler les familles de matériaux les plus propices au réemploi, afin de concentrer ses efforts et assurer au client un résultat. Il est, en effet, plus simple de garantir l’approvisionnement de matériaux de réemploi sur lesquels les retours d’expérience sont courants.

La liste des familles de produits sur lesquelles les acteurs du réemploi souhaitent porter en priorité leurs efforts

Dans sa démarche collective visant à sécuriser le réemploi, le CSTB liste les familles de produits sur lesquelles les acteurs du réemploi souhaitent porter en priorité leurs efforts : parquets cloués ou flottants, les portes intérieures, les appareils sanitaires, les plafonds suspendus, le faux plancher ou encore les revêtements de sols souples.

Les filières de reconditionnement permettent quant à elle l’approvisionnement d’un produit de type « catalogue », dont les fonctionnalités seront garanties par une fiche technique. Cibler des matériaux issus d’une filière offre donc la possibilité de s’approvisionner en produits passés par un processus de contrôle, réparation et nettoyage.

Adapter les critères face à la volatilité du gisement

L’homogénéité d’un gisement est une caractéristique à discuter avec la MOA. En effet, lorsque des matériaux de réemploi sont prescrits en quantité importante, le risque de dépendre de plusieurs gisements différents augmente. Un pourcentage d’acceptabilité par typologie de matériau peut être défini en phase d’appel d’offre, ou alors un nombre maximum de gisements proposé. L’homogénéité d’un gisement peut varier selon les zones (par exemple par étage, par bloc sanitaire etc.)

Aussi, il est indispensable de prévoir une variabilité de certains critères de sélection des matériaux, afin de s’adapter au mieux à la volatilité du gisement. Cette précaution peut prendre la forme d’un aléa sur les quantités (du type X unités de portes + ou – 10 unités) ou sur les dimensions (L = entre 80 et 110 cm), ou encore sur des critères esthétiques.

À ce jour, certains acteurs du réemploi (AMO, BET, fournisseurs, plateformes digitales…) ont la compétence pour juger la faisabilité d’un approvisionnement par lot recherché en fonction des critères de sélection préétabli, grâce à la capitalisation de leurs expériences. Dans une dynamique de généralisation des pratiques, les entreprises générales de construction seront, elles aussi, en mesure de le faire après plusieurs opérations et une connaissance plus pointue du marché.

Éviter les erreurs de chiffrage

Le chiffrage des prestations de réemploi constitue une étape clé dans la réponse à l’appel d’offre.

Le prix de chaque solution doit prendre en compte les éléments suivants (imaginons une dépose sur un site A puis une remise en œuvre sur un site B) :

  • Leur dépose sélective sur le site A
  • Leur transport jusqu’à/depuis un site de transformation/remise en état (si cela s’applique)
  • Leur préparation à la remise en œuvre
  • Leur fourniture et transport jusqu’au site B
  • Leur coltinage et manutention
  • Leur stockage
  • Requalification technique permettant de valider les performances du matériau en accord le futur domaine d’emploi (si cela s’applique)
  • Leur remise en œuvre sur le site B

Le cas d’un réemploi in-situ

Dans le cas d’un réemploi in-situ, la question de la fourniture est simplifiée puisque les matériaux sont disponibles. Le prix de la prestation est donc composé d’un coût de main d’œuvre horaire, avec une petite part de fourniture pour couvrir les réparations.

Compagnons Batisseurs

Il reste à estimer le temps de main d’œuvre nécessaire à la dépose soignée et à la remise en œuvre. En outre, il ne faut pas oublier de chiffrer :

  •  La requalification du gisement, notamment d’éventuels tests à prévoir, permettant de faire valider les solutions par le Contrôleur Technique du projet et les assureurs des différents intervenants
  • Le coût du stockage s’il n’y a pas d’espace approprié sur le site (hors d’air hors d’eau, humidité etc.)

Le cas d’un approvisionnement extérieur

Dans le cas d’un approvisionnement extérieur, la problématique est plus complexe, car il faut chiffrer une fourniture à la date D1, pour un achat à la date méconnue D2, tout en sachant que les délais de réponse des MOA sont de plus en plus longs : entre 6 à 18 mois pour les acteurs privés.

Une première solution serait de créer des partenariats avec des fournisseurs du réemploi sur des familles de matériaux récurrents, ce qui permettrait d’établir une grille de prix fixes sur une durée déterminée, révisable à date connue.

Une autre solution serait de cibler un partenaire en phase étude pour monter un devis en commun avec étude de faisabilité et expertise, et s’engager avec lui sur l’opération. Ce type de démarche permettrait de minimiser un écart de prix trop important entre le chiffrage et le coût réel, et de faire monter en compétence des sous-traitants sur les sujets d’économie circulaire.

Il est également possible d’observer les prix d’achat de matériaux de réemploi sous différents états (à déposer, à préparer, prêt à poser) sur les différentes plateformes de revente en ligne.


Comme le recommandent plusieurs partenaires dédiés à l’étude des prix d’un chantier, la transition idéale pour monter en compétence sur les sujets de réemploi et être performant serait de démarrer une démarche circulaire en petites quantités sur des projets dans lesquels le client ne l’impose pas.

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